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30 octobre 2008

L’avenir en jeu : Contestation par le pouvoir et les entreprises de l’enseignement des SCIENCES économiques et sociales

Libération du 02/02/08


On sent venir une opposition à l'enseignement des Sciences Economiques et Sociales, comme si on nous demandait de justifier notre utilité. Nicolas Sarkozy l'a dit un jour " faire des études de sciences humaines, c'est très bien, mais comme cela ne sert à rien, ce sera aux individus de les financer". Il y a donc désormais toute une culture à laquelle on risque de demander de justifier son existence.


Une Interview de Jean-Paul Fitoussi , Professeur des universités, président du Conseil scientifique de l'Institut d'études politiques de Paris, président de l'observatoire français des conjonctures économiques, membre du Conseil d'analyse économique auprès du premier ministre et Sylvain David Professeur agrégé de sciences économiques, président de l'association des professeurs de SES. Extraits ...


L'intelligence du monde est une valeur en soi !


L'enseignement des Sciences Economiques et Sociales (SES) n'a pas bonne presse en ce moment, accusé notamment de présenter une vision négative de l'entreprise. Le ministre Xavier Darcos ademandé un audit sur le contenu des manuels d'enseignement des sciences économiques et sociales. Qu'en pensez-vous ?


 

La pseudo-étude de Positive Entreprise, qui a lancé la polémique, ne fournit ni donnée chiffrée ni source ! Elle ne s'appuie sur aucun fait avéré. En fait, ce qui pose problème, c’est que certains lobbies ne souhaitent pas qu'on aborde ces questions sous un angle critique. Ils confondent regard critique et dénigrement. Selon eux, en montrant que les relations de travail peuvent être conflictuelles, on dénigre l'entreprise. De plus, les manuels ne sont qu'un support parmi d'autres. Penser qu'à travers eux, on peut résumer la pratique de l'enseignant, c'est soit de la méconnaissance, soit un procès d'intention - ce que je crois. Je préfère travailler sur des données de l'Insee plutôt que de m'appuyer sur des manuels scolaires vite périmés.


On propose que les représentants du monde de l'entreprise participent à l'élaboration des livres SES...


 

Toute la question est de savoir qui va définir ce que l'on doit enseigner. D'une certaine manière, il y a ici aussi un problème de laïcité. Le contenu des enseignements va-t-il être soumis à des groupes de pression qui vont frapper à la porte et dire : " Vous travaillez sur la famille, on pense que vous ne devez pas parler d'avortement !" Si l'on fait cela, c'est intenable. C'est aux universitaires de nous dire quels sont les savoirs suffisament consensuels et utiles, et comment les enseigner.

Cela n'empêche pas de dialoguer pour mettre en place des stages et des visites d'entreprises, mais dans un autre lieu. Nos détracteurs nous reprochent de consacrer trop de temps à la précarité, au chômage, etc. Quand nous le faisons, ce n'est pas pour stigmatiser les licenciements, mais pour analyser les évolutions, les catégories touchées, les politiques menées. Mais je me demande si ce qui les gêne, ce n'est pas le fait même d'en parler, s'ils ne voudraient pas cacher toute une partie de la réalité économique et sociale.


Le risque est que les bases que l'on veut enseigner à nos enfants deviennent des objets de forum ou de débat politique déconnectées du réel, ce qui est tout à fat contre-productif en matère pédagogique. Il y a aussi l'idée que les populations ne comprennent pas l'économie. Une idée fausse. Il y a derrière cela un enjeu politique. Si on veut nier cela, autant se dispenser d'un enseignement de l'économie et et faire place à de la communication !


Est-ce que bien présenter l'entreprise implique en même temps de mal présenter le salarié ?


 

Il ne s'agit pas d'opposer l'un à l'autre car rien n'est possible sans l'entreprise et rien non plus sans le travail. Dès qu'on prend le problème par ce petit bout, on arrive à une impasse. D'abord, on veut considèrer que si les français se réconciliaient avec l'économie de marché, l'économie irait beaucoup mieux. C'est un raisonnement très léger. Peut être que les français ont déja très bien compris les dysfonctionnements de l'économie de marché. Ensuite, on présente l'enseignement et la recherche comme le moyen privilégié de d'augmenter le taux de croissance.


La croissance économique devient le but premier et l'éducation l'instrument de cette croissance. Or, dans l'histoire, c'est l'éducation qui a toujours été le but prioritaire de l'enseignement. L'amélioration de notre savoir, de notre compréhension est un objectif hautement valable, indépendamment de ses conséquences ou non sur la croissance. L'aspiration à devenir plus intelligent face à notre environnement, il faut la satisfaire coûte que coûte !  Mais cela ne justifie pas l'enseignement. L'enseignement se légitime de lui-même. l'intelligence du monde est une valeur en soi. Malheureusement, cela se perd. Nous sommes en train de basculer dans une phase "utilitariste" de l'enseignement qui peut être très dangereuse.




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